L'arme au pied. Et larme à l'oeil. Le cessez-le-feu imposé par le confinement a fait bien des malheureux parmi les habitués du Tir Club Stade Laurentin. Il faut dire que, sur les bords du Var, c'est bien plus qu'une activité sportive qui se joue. Ici, des amitiés, des solidarités, des tranches de vie et de rire se nouent et résonnent entre les stands. Pour beaucoup, la discipline est un vrai moment refuge sur soi-même. Il suffit d'écouter les tireurs raconter comment ils entrent dans leur bulle pour atteindre ce pic de concentration indispensable à leur sport. Un temps de plénitude qui irradie le reste de leur journée. On imagine alors le manque causé par cette soudaine coupure. Un coup d'arrêt aussi sec que le claquement d'un tir. "C'est une saison blanche au niveau sportif" lâche Luc Caironi, le président du club, qui rappelle que sur les douze disciplines (soit 12 championnats nationaux) un seul a pu se tenir : les championnats de France de tir à 10 mètres. Une épreuve dont les résultats reflètent à merveille ce qu'incarne le TCSL puisqu'il a décroché trois podiums, tous par équipes : les carabiniers cadets Bogdan, Romain et Pablo ont décroché le Bronze tandis que les pistoliers seniors Julien, Marc et Fabrice revenaient avec la médaille d'argent autour du cou (épreuve de précision). Quant au Graal, l'or national, c'est Julien, Fabrice et Manu qui l'ont ramené en pistolet seniors (épreuve de vitesse).
Comme un symbole, la famille du tir laurentin est toujours plus forte en équipe. Les 11 autres championnats ont été annulés par la Fédération nationale. Et les 1 100 licenciés laurentins privés de leur passion. "On communique avec eux par les liens habituels, à savoir le mail et le site du club" précise le président. Fermeture du club, assemblée générale annulée, conseils de prévention... Sur le site, les licenciés peuvent échanger sur un Forum mis en place pour eux sous le nom "Pendant le confinement". Le président contacte régulièrement les 50 bénévoles du club et, par effet ricochet, a des nouvelles de la plupart de ses habitués. "Nous avons un licencié qui a été malade, contaminé dans son environnement professionnel, mais il est désormais guéri".
Pour le reste, le tir est une discipline difficile à entretenir dans le contexte d'un huis clos à domicile. Les jeunes compétiteurs ont, tout de même accès à du matériel du club. "Nous leur avons prêté trois carabines pour qu'ils s'entrainent chez eux, à sec, c'est-à-dire sans plomb", explique encore Luc Caironi. Cela leur permet de travailler la préparation, la position, la visée, le lâcher... mais pas le tir lui-même. Le club dispose aussi d'un système de simulation sur cible, baptisé SCATT. "C'est un logiciel d'analyse du geste qui s'installe sur ordinateur et qui est doté d'une caméra. On le fait tourner entre les compétiteurs en respectant au plus près les consignes de sécurité" ajoute le responsable associatif.
Le club prépare aussi l'après. "Avec le comité directeur, on s'organise pour être prêts à un éventuel redémarrage même si on sait que ce ne sera pas tout de suite" poursuit Luc Caironi. "On a déjà lancé l'achat de masques qui devraient nous arriver à la mi-mai et on modifie le règlement intérieur pour y intégrer les mesures telles que le lavage des mains, le port de masque en tissu et la distanciation qui imposera l'ouverture d'un poste sur deux sur les stands de tir. On prendra toutes les mesures nécessaires avec des contrôles et des exclusions de ceux qui ne les respecteraient pas. Vous savez, le respect des consignes de sécurité en matière de tir est impératif. On ajoutera des consignes d'hygiène. Avec la même rigueur".