Revenu sur ses terres, après un passage à La Trinité, Youssef Meftah a repris cette année les commandes de l'équipe première du Stade Laurentin Football avec succès. Leader du championnat de D2 au moment de la suspension des compétitions, le Laurentin, ancien milieu défensif, raconte comment il gère le confinement
A quoi ressemblent vos journées ?
Je suis chez moi, comme l'ensemble des joueurs. En tant que coach, quand on se lkève le matin, on a toujours en temps normal l'imprévisibilité au-dessus de la tête : vous avez beaucoup de personnes à vous occuper, entre le staff et les joueurs. Et puis, il y a le boulot - Youssef travaille au service éducation à la mairie de Saint-Laurent-du-Var -. Là d'un seul coup il n'y a plus ni la pression du football ni celle du travail. Sur le plan professionnel, un groupe de travail a été créé par Carole Lambert, la directrice du service. Mais je regrette de ne pas être au front avec certains qui gardent notamment la journée en classe les enfants de personnel soignants. Mais ma santé ne me le permet pas. Je suis frustré. ça m'embête d'être spectateur, mais je n'ai pas le choix, alors j'essaye d'aider autrement. Pour le volet foot, j'ai des contacts quotidiens avec les joueurs et j'échange régulièrement avec le président. Nous avons créé un groupe sur Messenger. Cela permet de nous voir et de prendre des nouvelles. Je fais le tour de l'effectif pour savoir comment ils se sentent avant tout en terme de bien-être et de santé. Et pour l'instant, tout va bien, personne n'a contracté le Covid-19 ni même dans leur entourage. La problématique du confinement, c'est de savoir quelles répercussions psychologiques il peut y avoir sur les gens.
Comment le vivent-ils justement ?
Pour l'instant la très grande majorité n'a pas la tête au football. Ils n'ont pas trop envie de parler de la compétition. Et c'est normal. Ils sont surtout à privilégier leur famille et font attention à eux. A côté de la santé, le football n'est pas très important même si le reste du temps c'est ce qui nous fait vibrer. Je ne leur mets aucune pression. Certains font quelques footings dans leur quartier mais je les encourage surtout à rester chez eux et à farie du cardio à la maison. Et cela même si je sais qu'en appartement en ville, ça n'est pas toujours facile.
On échange beaucoup entre nous via les réseaux sociaux
Y-a-t-il des points positifs à cette situation ?
Sincèrement je ne sais pas. Le confinement va peut-être encore plus resserrer les liens. On échange beaucoup entre nous via les réseaux sociaux comme je le disais. Pour ceux qui ont une vie de famille, ça va, ils font attention à eux et à leurs proches. On a des joueurs qui vivent ensemble, donc eux aussi, arrivent à partager des moments. C'est évidemment plus compliqué pour ceux qui sont seuls ou les plus jeunes qui ont un peu plus de mal à rester chez eux enfermer. C'est une situation que nous n'avons jamais vécu. On a été propulsé du jour au lendemain dans ce confinement. C'est inédit donc il faut s'habituer.
Et vous à titre personnel, en profitez-vous pour faire le point ?
Oui. J'ai décompressé pendant quelques jours. Et puis ça me permet de faire un retour sur notre saison, sur ce qui a fonctionné ou n'a pas marché. C'est intéressant, car quand on est pris par la compétition, on n'a jamais le temps de se poser et de faire un point d'étape. On peut réfléchir à ce qu'on va faire, comment on va le faire, si on a su faire passer les messages, préparer de nouveaux entraînements. Je ne suis pas dans le stress du résultat. Le seul stress c'est de savoir si la saison reprendra ou pas.
Et alors, votre pronostic ?
Je ne pense pas. Si le confinement se poursuit jusqu'en mai comme cela se profile, je pense que ça sera extrêmement compliqué de terminer la saison. Après, est-ce que la saison sera considérée comme blanche ? Est-ce que les équipes en tête, comme nous, accèderont à l'échelon supérieur? Est-ce qu'ils feront des play-offs ? Nous ne pouvons pas le savoir.
Avant de faire reprendre la saison, il faudra préparer les organismes ?
A un niveau amateur comme le nôtre, je ne pense pas que cela soit un véritable problème. Certains disent qu'il faut quatre à six semaines de préparation. Certainement au niveau professionnel mais pas à notre échelle. On a seulement deux entraînements d'1h30 toutes les semaines, donc au bout de dix ou quinze jours, on peut rejouer au foot. On sera de toute manière tous à la même enseigne.
Est-ce qu'il existe des incertitudes économiques et est-ce que ça modifie complètement la préparation de la saison prochaine ?
Il y a surtout des incertitudes sportives qui conditionnent le reste. Sur le plan économique, il faut voir avec le président. Sur le plan sportif, même si nous sommes dans le flou, on a des contacts entre nous entraîneurs, avec des présidents, des joueurs évidemment. On a du temps, donc on s'appelle. Mais une fois encore, la suite dépendra de la fin du confinement et des décisions qui seront prises par les instances sportives.
En élargissant le propos, quel regard portez-vous sur le contexte actuel ?
C'est difficile à dire. Je suis un peu révolté. Comment en est-on arrivé là ? L'humanité n'avait jamais connue ça. Je me demande comment on va sortir de ça et comment on sera. Je pense par exemple à mon métier. Je me pose des questions. Comment va-t-on accueillir des enfants, est-ce qu'ils devront porter des masques. Il faudrait tester tout le monde. Est-ce que le déconfinement va se faire par tranches d'âge, par département... Le président a parlé de guerre mais quand on part à la guerre il faut des armes. Et dans cette crise sanitaire, nous sommes partis sans masques, sans tests... C'est complètement irréel ce que nous vivons.